Comment (vraiment) gamifier votre formation ?
La gamification, c’est LE sujet à la mode dans le monde du digital learning. Pourtant, les idées reçues sont encore très fréquentes ! Dans cet article, je vous partage les aprioris et les erreurs courantes qui vous empêchent de gamifier votre formation de façon optimale.
D'ailleurs, à quoi correspond la gamification d'une formation ?
Gamifier une formation, c’est intégrer des mécanismes appartenant à l’univers du jeu pour renforcer l’apprentissage et la pédagogie.
Mais attention, il n’y a pas de formule universelle qui permettrait de gamifier votre formation. (Et non, il ne suffit pas d’ajouter un petit jeu entre deux modules, ce serait trop facile… 😉)
C’est avant tout une stratégie basée sur les besoins et les objectifs de vos apprenants. Le choix des techniques de gamification sera différent d’une formation à l’autre et s’adaptera toujours au contexte : le niveau des participants, le contenu des modules, les modalités d’apprentissages…
Pour gamifier votre formation, vous aurez donc besoin, dans un premier temps d’analyser puis de personnaliser. Et surtout, vous devez voir la gamification comme une véritable stratégie pour améliorer les résultats de vos apprenants.
Les idées reçues sur la gamification
La gamification c’est “apprendre sans apprendre”
J’entends parfois « Je veux que mes apprenants aient l’impression de ne pas être en formation. »
Pourtant, croyez-moi, ce n’est pas une bonne idée !
Votre but n’est pas de les détourner de la formation, au contraire, vous voulez leur donner envie d’apprendre.
L’objectif de la gamification n’est jamais de cacher l’apprentissage, mais bien de le renforcer.
Bien sûr, l’expérience de formation doit être agréable et fluide, mais on ne va pas pour autant mettre de côté la priorité n°1 : apprendre.
"La gamification motive instantanément"
Beaucoup s’imaginent la gamification comme une sorte de recette magique qui pourrait subitement régler tout problème de motivation des apprenants.
En réalité, il ne suffit pas d’ajouter un jeu pour rendre une formation passionnante en un instant. Des modules mal pensés, une formation trop lourde ou une absence de pédagogie ne seront jamais compensés par un jeu ajouté en dernière minute.
Cependant, une partie de cette idée reçue est vraie : la gamification motive les apprenants. Mais ce n’est en rien instantané…
Pour comprendre ce qui motivera vos apprenants, vous aurez besoin d’une analyse complète des besoins des apprenants et du contexte d’apprentissage.
Avant même de commencer, demandez-vous notamment : à qui s’adresse la formation ? Quel est l’objectif principal ? Quel est le niveau des apprenants ? Dans quel contexte ? C’est d’ailleurs ce que rappellent les auteurs Hamari, Koivisto & Sarsa : les résultats varient en fonction des contextes et des profils d’utilisateurs.
Un mécanisme qui fonctionne parfaitement dans un contexte peut échouer dans un autre. Par exemple, des systèmes de points ou de classements peuvent motiver certains profils compétitifs, mais en décourager d’autres, plus sensibles à la collaboration ou à l’autonomie.
Pour qu’elle soit efficace, la gamification doit donc être pensée comme une expérience utilisateur à part entière. Il est essentiel de se questionner sur ce qui motive réellement les apprenants ? Qu’est-ce qui les engage dans un parcours de formation ? Et surtout, comment utiliser les leviers du jeu pour renforcer leur implication, sans les distraire de l’objectif pédagogique ?
"La gamification, c'est pour les enfants"
Ou sa variante : “je n’ai pas besoin de gamifier ma formation, elle s’adresse à des adultes !” 👀
Un cliché qui reste bien accroché dans l’esprit collectif au fil des années…
Pourtant, gamification ne veut pas dire infantilisation.
Ce n’est pas parce qu’on utilise des mécanismes issus du jeu que l’on réduit la formation à un divertissement simpliste ou que les modules deviennent soudainement accessibles pour des enfants. Au contraire. Dans une stratégie de gamification, nous exploitons des leviers cognitifs puissants (je vous en décris quelques-uns plus bas dans cet article). Leviers qui fonctionnent à tout âge.
Car il n’y a pas d’âge pour être curieux, pour chercher à progresser, pour se challenger… Et d’ailleurs, les jeux ne sont pas réservés au monde de l’enfance : les adultes jouent aussi !
Selon le baromètre français du jeu vidéo, 84% des joueurs français ont plus de 18 ans. De plus, l’âge moyen est de 39 ans et 45% des séniors (65 ans et +) jouent aux jeux vidéos.
(Et c’est le cas en France, mais aussi dans le reste du monde : Un rapport sur le monde des jeux vidéos aux États-Unis.)
Sans oublier les jeux de société, les escape games, les salles de quiz qui ont particulièrement le vent en poupe en ce moment.
J’ajouterais également que le jeu est intégré dans notre quotidien, sans forcément qu’on le réalise. Les cartes de fidélité avec des niveaux et des récompenses, les applications de sport qui encouragent à battre votre record, les systèmes de points sur certaines cartes bancaires, les défis en entreprise ou même les réseaux sociaux utilisent des mécanismes similaires à ceux que l’on retrouve en gamification.
Alors, on est d’accord, ce serait dommage de s’en priver dans les formations ? Surtout si l’objectif est de nourrir l’apprentissage et de faire monter en compétences les apprenants.
“Pas besoin de jeux, ça va parasiter l’apprentissage”
“Ici, on travaille sur du sérieux, pas de place pour le divertissement”
Déjà en 2008, 40 % du marché de l’e-learning aux États-Unis utilisait le principe du serious gaming. Pourtant, en 2025, il m’arrive encore d’entendre que le jeu n’est pas compatible avec la formation…
En réalité, la gamification n’a pas pour objectif de divertir les apprenants. Elle est là pour créer un climat propice à l’apprentissage, pour améliorer la mémorisation ou encore pour conserver l’attention des apprenants.
D’ailleurs, ce n’est pas le jeu en lui-même qui nuit à l’apprentissage, c’est un usage mal pensé de ce dernier: un jeu qui n’a aucun lien avec les objectifs pédagogiques, qui complexifie inutilement l’expérience ou qui détourne l’attention sans apporter de valeur.
Alors non, intégrer du jeu dans un module de formation ne revient pas à transformer la salle de classe en cours de récré. Il s’agit d’améliorer l’implication et l’attention des apprenants pour rendre la montée en compétence plus efficace.
D’ailleurs de nombreuses études confirment que les jeux sérieux favorisent la mémorisation à long terme grâce à leur caractère immersif et interactif, permettant ainsi un ancrage plus profond des connaissances.
Les erreurs à éviter dans la gamification d’une formation
Utiliser la gamification parce que c’est “à la mode”
Si vous ajoutez de la gamification dans votre formation juste pour le principe, juste parce que c’est la tendance du moment, vous n’aurez pas de résultats… Au contraire, vous allez parfois perdre vos apprenants et vous retrouver avec un taux d’engagement proche de zéro.
Si les mécaniques du jeu ne sont pas au service d’un objectif clair, les apprenants les percevront comme des gadgets, voire comme une perte de temps. Résultat : vous pourrez créer de la frustration ou un désintérêt de la formation.
Infantiliser vos apprenants
Infantiliser l’apprentissage, c’est le meilleur moyen de perdre votre audience. Une formation gamifiée ne doit pas donner l’impression d’être un coloriage pour maternelle. L’apprenant doit se sentir challengé, pas pris pour un imbécile.
Mais cela implique une exigence : respectez l’intelligence et la maturité des personnes qui suivront la formation.
Il ne s’agit pas de « rendre l’apprentissage rigolo » à tout prix, mais plutôt de le rendre plus signifiant, plus interactif, plus stimulant.
Et qui dit ludique et interactif ne signifie pas “simplet”, au contraire.
Reproduire des applications connues sans stratégie ni réflexion
Oui, Duolingo c’est génial, mais est-ce que tenter de reproduire l’application vous apportera des résultats dans votre formation ? Dans la majorité des cas : non.
Tout simplement, car le contexte est différent.
Bien sûr, rien ne vous empêche d’avoir une mascotte, d’ajouter des badges et un mécanisme de points. Mais le plus important, c’est de savoir pourquoi vous décidez de les ajouter.
Est-ce que ça va réellement servir votre formation ? Et l’apprentissage ?
Ou est-ce que c’est un juste petit plus que vous ajoutez pour le principe ?
Mes conseils pour gamifier votre formation :
1 - Créer une vraie stratégie de gamification
Je ne le répéterai jamais assez : la gamification, ce n’est pas seulement ajouter une touche de fun dans une formation… C’est une vraie démarche stratégique.
Comme je vous le partageais déjà plus haut, pour créer une stratégie, la première étape est d’analyser et de comprendre le contexte de la formation.
→ Quels sont les objectifs pédagogiques ? Quels sont les enjeux de la formation ?
→ Quel est le profil des apprenants ? Quelles sont leurs attentes ? Leurs niveaux ?
→ Quel est leur rapport à la formation ? Est-ce qu’elle est volontaire ? Ou est-ce qu’elle est imposée dans le cadre du travail ?
→ Est-ce que la formation est en présentiel ou en ligne ? Peut-être que c’est un programme hybride ?
Et c’est en comprenant le contexte que l’on décidera ensuite quels leviers activer pour favoriser l’engagement et l’apprentissage.
D’ailleurs, dans cette phase d’analyse, attention aux biais cognitifs ou aux aprioris qui pourraient vous faire croire que certains groupes d’apprenants n’aiment pas apprendre… Ce sont souvent des croyances sociétales qui ne devraient pas influencer sur la construction de votre formation et de sa gamification.
2 - Intéressez-vous aux leviers psychologiques
Une formation gamifiée n’a d’impact que si elle active les bons leviers psychologiques. Or, pour susciter un engagement durable, au-delà de l’effet de nouveauté ou de la récompense immédiate, il faut aller plus loin que les mécaniques de surface. Ce n’est pas le badge qui engage, c’est ce qu’il déclenche chez l’apprenant : un sentiment de progression, une reconnaissance, un défi relevé…
C’est pourquoi il est essentiel de comprendre les leviers sur lesquels repose l’apprentissage, l’engagement ou même la motivation. Mais aussi d’identifier si ces leviers font sens avec les objectifs de la formation.
Dans cet article, je vais vous en citer quelques-uns. Pour en découvrir d’autres, je vous invite à me suivre sur LinkedIn et sur YouTube, où je vous partage régulièrement du contenu sur la gamification de formation.
La théorie de l’autodétermination
La gamification active la motivation intrinsèque : cette envie d’apprendre qui vient de soi, sans pression extérieure.
D’après la théorie de l’autodétermination (Deci & Ryan), trois besoins doivent être satisfaits pour qu’un individu reste motivé :
1 - L'autonomie
L’apprenant doit se sentir à l’origine de ses actions, de ses choix.
Une formation gamifiée lui permet de personnaliser son parcours, de choisir son rythme, d’accéder à plusieurs scénarios ou modules en fonction de ses préférences. C’est cette liberté qui renforce l’engagement, car l’individu a le sentiment d’apprendre pour lui-même, et non parce qu’on lui impose un contenu.
2 - La montée en compétence
Le principe ici est de reconnaître et de valoriser chaque réussite au fil de la formation. (Sans pour autant infantiliser vos apprenants. 😉) L’idée est de renforcer la confiance et l’envie d’aller plus loin. Pour ça, vous pouvez, par exemple, ajouter des missions à difficulté croissante ou des feedbacks positifs.
3 - L'affiliation
L’apprentissage est différent s’il se fait seul ou au sein d’un groupe. Le lien social est souvent oublié dans la construction d’une formation, pourtant y penser peut apporter une réelle différence dans les résultats de vos apprenants.
Si c’est cohérent avec votre formation et vos objectifs, vous pouvez intégrer des dynamiques collectives : des classements, des défis de groupe, des systèmes de coapprentissage.
Ici, le principe est de sortir l’apprenant de l’isolement qu’il peut ressentir dans son apprentissage pour le faire participer à une communauté en mouvement, ce qui l’aidera à rester motivé et engagé.
Le pouvoir des objectifs clairs
Selon la théorie des objectifs de Locke & Latham, la motivation est directement influencée par la clarté, l’accessibilité et la progression des objectifs.
En d’autres termes, plus un objectif est précis, atteignable et évolutif, plus l’apprenant sera motivé pour le réaliser.
Lorsque l’apprenant sait exactement ce qu’il doit accomplir, il se sent plus en contrôle de son parcours. Un objectif flou ou mal défini laisse place à la confusion, réduisant ainsi la motivation. Par contre, lorsque les objectifs sont précis (par exemple : “compléter ce module en 30 minutes” ou “obtenir 80% de bonnes réponses au quiz”), l’apprenant sait exactement ce qu’il doit atteindre.
Mais attention, les objectifs doivent être atteignables !
Un objectif trop ambitieux peut décourager. À l’inverse, un objectif trop facile peut entraîner de l’ennui et de la frustration. Les objectifs atteignables sont cruciaux pour maintenir une motivation durable. Cela rejoint la notion de « zone de développement proximal » de Vygotsky, où l’apprenant est poussé à se dépasser, mais sans se retrouver dans une situation d’échec permanent.
En gamification, des systèmes de niveaux sont souvent utilisés pour diviser les grands objectifs en petites étapes. Chaque niveau franchi devient un objectif à part entière, que l’apprenant peut atteindre avec effort et persévérance. Cela lui permet de progresser tout en restant motivé par des succès intermédiaires.
La théorie de la récompense
Lorsque nous réussissons un défi ou recevons un feedback positif, notre cerveau libère de la dopamine, un neurotransmetteur clé associé au plaisir et à la motivation.
Cette recherche de dopamine renforce les comportements qui mènent à une récompense, nous incitant à répéter ces comportements pour renouveler la sensation de plaisir. Dans un contexte d’apprentissage, cela se traduit par un renforcement positif : plus l’apprenant réussit, plus il reçoit de la dopamine, et plus il est motivé à continuer.
En exploitant ces récompenses via des systèmes de gamification, les apprenants deviennent non seulement plus engagés, mais ils sont également plus curieux et prêts à s’investir davantage. La motivation devient un cercle vertueux : à chaque succès, de la dopamine est libérée, renforçant l’envie de continuer à progresser.
3 - Formez-vous à la gamification
Si vous ne deviez retenir qu’un conseil de cet article, ce serait bel et bien celui-ci ! Pour gamifier efficacement votre formation, formez-vous ! (Ou déléguez la conception de votre formation à des professionnels de la gamification.)
Et d’ailleurs, ça tombe bien ! C’est exactement ce que l’on vous propose chez Meujesse Learning : à la fois de la formation et des prestations sur mesure pour gamifier votre formation et (vraiment) améliorer vos résultats.
Je vous propose de m’envoyer un mail à contact@meujesselearning.com pour discuter de votre projet de formation.
Et complément de cet article, je vous propose de visionner cette vidéo que j’ai faite en collaboration avec Alexandre Duarte, auteur de la boite à outil de la gamification. Nous avons échangé sur le sujet de la gamification de formation, le tout avec de nombreux exemples concrets.
Je vous invite également à me suivre sur LinkedIn et YouTube, où je vous partage régulièrement des conseils concrets pour apprendre à gamifier vos formations.
